Panique au salon

2013-12-08 144409


Dans 5 mn le grand hall du salon des vins fermera ses portes, les allées si bruyantes, si agitées, si vivantes dans la soirée se vident peu à peu ...

 

les vignerons réajustent les piles de cartons, bouchonnent les bouteilles à moitié bues, réhabilitent les présentoirs avant de quitter les lieux, certains stands sont maintenant déserts, les équipes de sécurité se déploient pour la nuit …

Et moi je suis planté là, ahuri, tentant de trouver un échappatoire à ma situation désespérée : j’ai une pile de cartons qui encombre le stand de Denis, encore des bouteilles achetées, payées, mais laissées sur leur stand d’origine, aucun chariot de transport disponible, et je dois récupérer et sortir avec le tout avant la fermeture … que faire ?

Et il y a Michel, sandwich à la main, me contant haut et fort la magnificence des Gevrey de chez Tortochot, qui est visiblement dans la même situation logistique que moi, mais si stoïque, rigolard, joyeux, détendu, d’un calme imperturbable qui ne fait qu’accentuer mon angoisse … au secours !

Pourtant tout avait si bien débuté. Je venais ici avec 2 collègues désireux de découvrir les bonnes adresses de la sélection de Michel, et je savais aussi que j’allais croiser le chemin des copains : Odile et François, Etienne, Olivier, Gilles, Jean Lou, Karine et Ollivier, Flo et Denis, Michel bien sûr, et puis aussi les vignerons pour qui ma présence au salon était habituelle et récurrente.

Sur le premier stand, champagne de chez Petitjean Pienne, on avait le temps … le temps d’une gorgée de « cœur de chardonnay », c’est vif, ça pétille dans la tête, parfait pour l’apéritif, puis d’une autre de la cuvée « réserve », champagne plus vineux et plus complexe aussi, à boire à table avec une choucroute ou du poisson. Toutes les différentes cuvées ou presque y sont passées ! « c’est vraiment extra ce que vous faîtes, mettez moi en un carton, je le prendrai en fin de soirée, merci pour tout … ».

Puis ce fut au tour des vins de Savoie de chez Dupasquier où nous allions goûter la « Mondeuse » et le « Marestel », « c’est vraiment extra ce que vous faîtes, mettez moi en un carton, je le prendrai en fin de soirée, merci pour tout … ».

Et on a suivi ainsi notre bonhomme de chemin de stand en stand, aux châteaux d’Or et de Gueules et d’Oupia, aux domaines du Jas, du Deffends, de l’Ancienne Cure … Que de belles cuvées et des vignerons affables. J’étais toujours accompagné de mes 2 acolytes, buvant plus qu’ils ne crachaient, ce qui à la longue pousse à faire des achats inconsidérés. Et en toute circonstance, toujours le même protocole : « c’est vraiment extra ce que vous faîtes, mettez moi en un carton, je le prendrai en fin de soirée, merci pour tout … ».

Entre 2, on se tape l’inévitable sandwich au foie gras, quelques gorgeons de Pommard de chez Girardin, et il est maintenant 22h00; on a encore une heure pile pour tout récupérer et se faire la malle, mais c’était sans compter les coups du sort et une bonne dose d’adversité !

22h05, je vais discutailler avec les potes sur le stand de Denis. 22h20, je découvre impuissant, au regard de la file d’attente et du stock de chariots vide, que mon salut ne viendra pas de ces chariots que l’organisation du salon met à disposition gracieusement ce soir. 22h25, j’entame mon parcours du combattant en tentant de tout transporter « à la main » et de déposer au fil de l’eau la marchandise sur le stand de Denis. 10h35, je pose un carton derrière le comptoir Ferrer-Ribière, je n’ai plus la lucidité pour définir le meilleur parcours pour la collecte des cartons, mais ma faculté de calcul résiduelle me permet quand même de déterminer à coup sûr … que ça va pas l’faire !

Un coup de bol, un vigneron me prête un diable et je fonce dans les travées sous le regard ahuris des badauds tranquilles, au risque de mettre à bas mon chargement de cartons. 22h47, il faut que je rende le diable, j’ai perdu une pièce de l’engin, ma conscience me force à la retrouver, j’y renonce rapidement et me confonds en plates excuses, je cours maintenant, désespéré, voir Denis ; mes compères doivent être au service de livraison à domicile.
22h55, j’ai déjà empilé une douzaine de cartons et 5 magnum mais ma quête n’est pas finie, je suis transpirant d’effort et d’angoisse, et en face de moi Michel, comme évoluant dans la quatrième dimension.

J’ai bien failli renoncer pour aller me taper moi aussi, pendant les 5 mn restantes, les bons Gevrey de chez Tortochot, avec l’espoir peut-être de pouvoir ensuite pousser la porte vers le multidimensionnel, mais j’ai fini par retourner emprunter un chariot (maintenant disponible, normal il est 23h10 !).
7 mn plus tard j’étais dehors avec toute la cargaison, avec Michel et Olivier, et le chariot était rendu.

Alors seulement j’ai ressenti distinctement au plus profond de mon être charnel un relâchement total des boyaux.